Les batteries au sodium : est-ce la technologie de l’avenir ?
26/07/2023 – Blog, Tout sur les batteries au lithium
L’évolution technologique dans le secteur des batteries est en constante ébullition et la recherche de technologies toujours plus efficaces et performantes, susceptibles d’apporter une valeur ajoutée au marché, est toujours d’actualité.
Ces dernières années, les batteries sodium-ion sont apparues parmi les innovations chimiques qui ont suscité le plus d’intérêt, notamment pour un aspect économique.
Nous en avons parlé dans l’épisode 20 de Battery Weekly 2023, notre chronique hebdomadaire sur le monde des batteries, où nos experts en électrification, Marco Righi, Alan Pastorelli et Daniele Invernizzi, ont analysé les fortes tendances de croissance qui caractérisent les batteries au sodium et les limites qui entravent actuellement leur diffusion à grande échelle.
Si l’on estime que le déploiement des batteries sodium-ion se développe rapidement, aussi bien côté stockage de l’énergie que côté mobilité électrique, il est important de souligner que ces batteries rencontrent encore certaines obstacles qui doivent être résolus avant qu’elles puissent être commercialisées pour un large éventail d’applications.
Découvrons ensemble ce que sont les batteries au sodium et quelles sont leurs caractéristiques.
LA CHRONIQUE LIVE TOUS LES LUNDIS À 18H00 SUR LES CHAÎNES LINKEDIN ET YOUTUBE DE FLASH BATTERY QUI FAIT LE POINT SUR LES DERNIÈRES TENDANCES EN MATIÈRE D’ÉLECTRIFICATION.
Le sodium, comme le lithium, est un métal alcalin et, comme le lithium, se trouve dans le premier groupe du tableau périodique.
En examinant le tableau périodique, vous pouvez constater que les deux métaux sont situés exactement l’un en dessous de l’autre dans la première colonne et qu’ils partagent donc certaines caractéristiques chimiques et physiques.
C’est précisément en raison de la similitude de certaines propriétés qu’entre 1970 et 1990, les premières études sur les batteries au sodium ont été menées en même temps que celles sur les batteries au lithium, la différence étant que les batteries au lithium ont eu plus de succès et ont été commercialisées, laissant à la traîne le développement du sodium.
Le principe de fonctionnement des batteries sodium-ion et lithium-ion est pratiquement identique, et de nombreux matériaux d’électrode utilisés dans la technologie sodium-ion ont été empruntés à la technologie lithium-ion.
Dans les deux technologies, les ions sont responsables du transport et du stockage de l’énergie. Les ions sodium migrent de l’électrode positive, la cathode, vers l’électrode négative, l’anode, à travers l’électrolyte et le séparateur portés par le courant électrique pendant la phase de recharge. Lors du processus de décharge, les ions retournent vers la cathode et un flux d’électrons – c.-à-d. un courant électrique – circule dans le circuit externe dans la direction opposée à la recharge.
La cathode est le pôle positif de la batterie constitué d’un matériau cathodique, par ex. LFP (lithium fer phosphate), NMC (nickel manganèse cobalt), et d’un collecteur de courant, tandis que l’anode est le pôle négatif de la batterie constitué d’un matériau anodique (par ex. carbone ou graphite) et d’un collecteur de courant.
Une cellule au sodium se compose essentiellement d’une cathode faite d’un matériau capable de contenir du sodium, d’une anode généralement faite de carbone et d’un électrolyte liquide contenant des atomes de sodium sous forme ionique. L’électrolyte est le liquide organique qui remplit le volume interne de la cellule, servant de lien entre la cathode et l’anode et permettant aux ions de se déplacer.
D’un point de vue purement chimique, il existe des différences significatives entre les deux éléments : le rayon atomique du cation sodium est supérieur de 0,3 Å à celui du cation lithium. Cela signifie qu’il a plus de 3 fois le poids atomique et la masse du lithium.
Cette caractéristique entraîne des problèmes techniques considérables à résoudre : la masse de l’atome de sodium, 3 fois supérieure à celle du lithium, se déplaçant entre l’anode et la cathode crée une contrainte mécanique plus importante, qui comporte une dégradation élevée de la cellule.
En conséquence, les batteries au sodium ont une durée de vie réduite et sont moins performantes que les batteries au lithium car le graphite, l’anode la plus couramment utilisée avec le lithium, interagit avec l’ion sodium et subit des réactions irréversibles d’exfoliation, et se décompose après seulement quelques cycles.
L’un des aspects les plus complexes pour le succès d’une batterie au sodium est donc l’identification d’une électrode négative appropriée pour remplacer le graphite et, en relation avec le sodium, pour augmenter les cycles de vie de la batterie.
L’ion sodium a également un potentiel de réduction standard inférieur à celui du lithium, c’est-à-dire qu’il a moins tendance à acquérir des électrons. Par conséquent, une batterie au sodium pourra fournir une tension maximale plus faible qu’une cellule au lithium : la tension nominale de la cellule au sodium est de 2,3 – 2,5 V contre 3,2 – 3,7 V pour le lithium. Les processus électrochimiques qui se déroulent à l’intérieur des batteries sodium-ion et lithium-ion étant les mêmes, le sodium et le lithium transportent la même charge, mais à poids égal, une batterie au sodium transportera moins de charge qu’une batterie au lithium, c’est-à-dire qu’elle aura une densité énergétique plus faible.
La combinaison de ces deux caractéristiques signifie que la quantité d’énergie qu’une batterie au sodium peut contenir est environ 40 % inférieure à celle d’une batterie au lithium.
Le regain d’intérêt pour les batteries au sodium est principalement dû à la nécessité de trouver des alternatives concrètes au lithium dans toutes les applications où la production peut choisir une alternative.
Bien que le lithium soit naturellement présent dans de nombreuses roches et dans certaines saumures, il n’est pas inépuisable dans l’écorce terrestre et, en outre, son extraction implique l’utilisation de ressources et d’énergie.
La forte demande pour cet élément, combinée à sa disponibilité limitée dans la nature, a entraîné une augmentation du coût de la matière première au point qu’il a été baptisé « or blanc ». Pour l’avenir, la demande de batteries au lithium devrait augmenter, ce qui soulève des questions concrètes sur la disponibilité des matières premières et la durabilité d’une économie basée uniquement sur cette chimie.
Il est évident que l’obtention des meilleures performances, compte tenu de l’application prévue des technologies, est un aspect non négligeable du processus de recherche de chimies alternatives.
Les batteries au sodium peuvent-elles constituer une alternative viable au lithium ? Analysons plus en détail les avantages et les inconvénients des batteries au sodium.
L’un des aspects les plus intéressants de cette technologie est la grande disponibilité dans la nature des matières premières qui la composent : le sodium est en effet le sixième élément le plus abondant dans l’écorce terrestre. Cette caractéristique rend les batteries au sodium économiquement compétitives, un aspect important pour les fabricants.
La batterie au sodium garantit également des normes de sécurité élevées car les cellules basées sur cet élément chimique ne sont pas inflammables et ne sont pas sujettes aux explosions ou aux courts-circuits. Ces batteries sont également capables de résister aux températures froides, pouvant fonctionner dans une plage de températures de -20 à +60 °C, alors que la plage de fonctionnement optimale des batteries au lithium se situe entre 0° et +50°.
La facilité à trouver des matières premières dans la nature, avec de faibles coûts d’extraction et une utilisation limitée d’énergie, fait finalement du sodium un élément à faible impact environnemental.
L’un des principaux inconvénients des batteries au sodium est la densité énergétique, c’est-à-dire la quantité d’énergie stockée par rapport au volume de la batterie : les batteries au sodium ont encore une densité assez faible, entre 140 Wh/Kg et 160 Wh/kg, par rapport à 180 Wh/Kg – 250 Wh/Kg pour les batteries lithium-ion.
Un autre aspect très important dans le choix des batteries au sodium est actuellement la faible durée du cycle de vie. Cette dégradation rapide est due à la masse des ions sodium, qui est environ 3 fois supérieure à celle des ions lithium. Dans le déplacement entre l’anode et la cathode, les ions sodium produisent un stress mécanique accru qui entraîne la destruction rapide du graphite, le matériau anodique, après quelques cycles.
Les batteries au sodium pourraient constituer une alternative aux batteries au lithium dans les applications où le facteur économique l’emporte sur les performances élevées.
En particulier, leur faible coût et leur faible densité énergétique rendent les batteries sodium-ion particulièrement adaptées aux applications sédentaires et aux systèmes de stockage de l’énergie tels que les centrales photovoltaïques et éoliennes à production intermittente. En effet, le haut degré de sécurité des dispositifs sodium-ion les rend adaptés à ce type d’application qui nécessite des cycles de recharge et décharge fréquents, horaires et quotidiens.
À l’heure actuelle, la technologie des ions sodium n’est pas particulièrement répandue dans ce domaine en raison de sa courte durée de vie, qui ne permet pas de répondre au nombre élevé de cycles de recharge et décharge que requièrent ces applications. Si, au fur et à mesure que la recherche progresse, les cellules au sodium deviennent également compétitives sur le plan de la durée de vie, elles pourraient certainement constituer une technologie viable pour les applications sédentaires.
« Les batteries au sodium sont actuellement moins performantes, en raison d’une faible densité énergétique, mais elles constituent une véritable alternative au lithium pour toutes les applications ne nécessitant pas de hautes performances. C’est un aspect essentiel pour répondre aux exigences d’un marché en pleine croissance et qui est destiné à se développer encore davantage. Il est important de se tourner vers l’avenir et être en mesure de garantir la durabilité de la filière, en utilisant le lithium dans les secteurs où il est indispensable et en recherchant des technologies qui permettent de différencier une partie de la production et ne pas dépendre uniquement du lithium pour répondre à toutes les exigences en matière d’électrification. »
Selon les prévisions, le marché des batteries sodium-ion devrait croître de 27 % par an au cours des dix prochaines années. On estime que la production annuelle passera de 10 GWh en 2025 à environ 70 GWh en 2033, soit une augmentation de près de 600 %.
Le déploiement de la technologie sodium-ion pourrait être facilité par le fait que de nombreuses technologies de production des cellules au sodium sont communes avec les cellules au lithium-ion, ce qui offre la possibilité de convertir les usines et de limiter davantage les coûts de production.
Bien que les batteries sodium-ion aient encore des limites à surmonter, elles suscitent un intérêt croissant dans le monde de l’électrification, à tel point que certains grands acteurs internationaux de la production de batteries se sont également tournés vers cette technologie.
C’est notamment le secteur automobile qui s’intéresse avec curiosité aux batteries au sodium.
La chimie sodium-ion a été remise sur le devant de la scène en 2021 par CATL, le plus grand fabricant mondial de batteries lithium-ion pour véhicules électriques et systèmes de stockage d’énergie, qui l’a présentée comme l’une des technologies émergentes dans lesquelles il investirait pour différencier sa production.
En effet, le géant chinois a compris que le remplacement d’une partie du marché des batteries lithium-ion par des batteries sodium-ion présenterait des avantages significatifs en termes de réduction du prix des batteries lithium-ion.
L’idée novatrice de CATL, développée pour surmonter les limites des batteries au sodium, consiste à mettre au point un ensemble de batteries hybrides, dont le principe repose sur le fait de mélanger et assortir des batteries sodium-ion et des batteries lithium-ion dans une certaine proportion, à les intégrer dans un système de batteries unique et à contrôler les différents systèmes de batteries par l’intermédiaire d’un BMS intelligent. Le véhicule pourrait exploiter les performances à basse température de la batterie sodium-ion ou la haute densité énergétique de la batterie lithium-ion, selon les besoins. Le projet en est encore au stade expérimental, mais l’entreprise chinoise a déjà attiré l’attention de l’ensemble de l’industrie.
Malgré quelques problèmes critiques encore à résoudre, la technologie de l’ion sodium se taille une place de plus en plus importante sur le marché. Comme c’est le cas pour d’autres technologies émergentes, telles que les batteries à l’état solide, la recherche est en constante ébullition et investit d’importantes ressources afin de surmonter les limites qui, à ce jour, empêchent un déploiement à grande échelle. L’introduction de cette technologie sur le marché pourrait apporter des avantages concrets à tous les secteurs, tels que le stockage de l’énergie, où la densité énergétique est subordonnée au facteur économique et qui, pour l’instant, dépendent exclusivement des batteries au lithium.
DÉCOUVREZ COMMENT LES BATTERIES FLASH BATTERY PEUVENT AMÉLIORER LES PERFORMANCES DE VOS VÉHICULES
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER POUR RECEVOIR TOUS LES NOUVEAUX ARTICLES FLASH BATTERY